Une Foire aux questions (FAQ) prise par une administration peut-elle faire l'objet d'un recours en annulation ? OUI!
Dans un arrêt du 3 février 2023 (n° 451052), le Conseil d’Etat confirme qu’une Foire Aux Questions (FAQ) émanant d’une autorité publique peut faire l’objet d’un recours en annulation (ou recours pour excès de pouvoir).
1 - Qu’est-ce qu’un acte de droit souple ?
Un acte de droit souple est un acte ayant pour objet de modifier ou d’orienter le comportement des destinataires, sans créer de nouvelle règle de droit (Rapport du Conseil d’Etat, 2013, Le Droit Souple). Ce sont les avis, recommandations, notes d’interprétation, FAQ, etc.
Si initialement le juge administratif considérait que ces actes n’avaient pas de conséquence sur la situation des individus, et donc ne pouvaient pas être contestés, il est revenu sur ce point dans certains cas.
2 - A quelles conditions un acte de droit souple peut-il faire l’objet d’un recours en annulation ?
Si les 3 conditions suivantes sont remplies :
- Le document est de portée générale (ex : circulaires, instructions, recommandations, notes, présentations ou interprétations du droit positif)
- Celui-ci émane d’une autorité publique
- Celui-ci est susceptible d’avoir des effets notables sur les droits ou la situation d’autres personnes que les agents chargés d’appliquer le texte
(Conseil d’Etat, Section, 12 juin 2020, n° 418142, GISTI)
A l’évidence, c’est la notion « d’effets notables sur droits ou la situation » du requérant qu’il faudra le plus argumenter, un professionnel du droit pouvant être utile pour cela.
3 - Quel argument invoquer pour obtenir l’annulation d’un acte de droit souple ?
Un acte de droit souple peut être annulé si l’un des 3 vices de légalité suivant est établi :
- L’acte fixe une règle nouvelle alors que l’autorité est incompétente pour le faire,
- L’acte méconnait le sens et la portée du texte qu’il applique,
- L’acte met en œuvre une règle contraire à une norme juridique supérieure.
Ainsi, si un acte de droit souple (FAQ, circulaire, instruction, etc.) répond à une de ces situations, vous pouvez en demander l'annulation auprès du juge administratif.
4 - Quel est l’apport de l’arrêt du Conseil d’État du 3 février 2023 ?
Dans le cadre des aides covid-19, le Ministère de l’économie, des finances et de la relance avait publié sur son site internet une FAQ. Cette FAQ excluait d'office les loueurs en meublés non professionnels au fonds de solidarité.
Une requérante, loueuse en meublé non professionnelle, estimant que le droit existant n'était pas aussi catégorique que le présentait la FAQ, a formé un recours pour excès de pouvoir à l'encontre de cet acte.
Dans son arrêt, le Conseil d’Etat juge, d’une part, qu’« eu égard à sa teneur, cette interprétation du droit positif [la FAQ] (…) est susceptible de produire des effets notables sur la situation des personnes qui souhaitent bénéficier de ces mesures de soutien ». D’autre part, la Haute juridiction, va annuler la FAQ au motif que les dispositions en litige méconnaissent le champ des personnes susceptibles de bénéficier du fond de solidarité.
Par cet arrêt, le Conseil d’Etat confirme qu’il est possible d’obtenir l’annulation d’un acte de droit souple.
Dans cet arrêt, la requérante n’a pas accompagné sa demande d’annulation, d’une demande indemnitaire, mais à notre sens, rien n'exclu par la suite d'arguer de cette illégalité comme une faute de l'administration au soutien d'un recours indemnitaire.
Si vous aussi, vous avez intérêt à demander l'annulation d'un acte de droit souple (avis, recommandation, FAQ, note d'interprétation, etc.), n'hésitez pas à contacter Maître Isabelle HARTMANN.